Qu'est-ce que le droit de préemption en immobilier ?

Le droit de préemption permet à certaines personnes ou organismes de se porter acquéreur prioritaire d’un bien immobilier mis en vente, et cela, aux mêmes conditions que celles acceptées par le vendeur avec un autre acheteur. Il peut donc arriver que vous trouviez un acquéreur pour votre appartement mis à prix 800 000 €, celui-ci étant finalement devancé par la Mairie qui décide de l’acheter au même prix. Ce mécanisme juridique, souvent méconnu des vendeurs, peut faire échouer une vente au dernier moment et rallonger les délais de plusieurs mois.

Comment fonctionne exactement le droit de préemption ?

Le droit de préemption est un droit préférentiel qui s’exerce en activant plusieurs étapes encadrées par la loi. Dès qu’un compromis de vente ou une promesse de vente est signé, le notaire est dans l’obligation d’envoyer une Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA) au titulaire du droit. Ce dernier dispose alors de 2 mois pour répondre :

  • Soit il renonce,
  • Soit il « préempte » au prix proposé,
  • Soit il fait une contre-offre.

Si le titulaire préempte au prix, la vente lui est automatiquement transférée et l’acquéreur initial est alors évincé. S’il propose un prix inférieur, le vendeur peut refuser et maintenir son prix, accepter ou encore renoncer à vendre.

En cas de désaccord sur le prix, le juge de l’expropriation tranche. Point crucial : le silence vaut renonciation. Passé le délai de 2 mois sans réponse, la vente peut se poursuivre normalement.

Qui peut exercer un droit de préemption sur un bien ?

Plusieurs acteurs détiennent ce privilège.

Très souvent, les communes exercent leur droit de préemption urbain (DPU) afin de créer des logements sociaux, des équipements publics ou protéger des commerces. À Paris, ce droit s’applique dans presque tous les arrondissements.

L’État préempte régulièrement avec l’intention de protéger le patrimoine historique ou certains espaces naturels. Un château classé, un hôtel particulier remarquable ? L’État peut intervenir.

Les départements et régions interviennent sur des projets spécifiques.

Les locataires, eux aussi, ont un droit de préemption lors de la vente de leur logement. Même le fermier peut préempter les terres qu’il exploite.

Quels biens sont soumis au droit de préemption ?

En zone urbaine, le droit de préemption s’applique aux immeubles bâtis ou non bâtis situés dans les zones U (urbanisées) ou AU (à urbaniser) du Plan Local d’Urbanisme. Les ventes de parts de SCI donnant vocation à l’attribution d’un immeuble sont également visées.

Échappent au droit : les immeubles de moins de 10 ans (sauf DPU renforcé), les donations, les ventes entre parents jusqu’au 6e degré, les ventes entre copropriétaires.

Attention : à Paris et grandes villes, le DPU renforcé s’applique même aux copropriétés récentes. Un appartement avenue Victor Hugo peut être préempté même s’il date de 2015.

Comment savoir si mon bien est soumis au droit de préemption ?

Première étape : consultez le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de votre commune, disponible en mairie ou en ligne. Les zones soumises au DPU y sont clairement délimitées. Le notaire vérifiera systématiquement cette information avant contrat de vente.

Pour les biens d’exception, des vérifications supplémentaires s’imposent :

  • Un hôtel particulier dans le Marais ? Vérifiez s’il est en secteur sauvegardé.
  • Une propriété avec parc en périphérie ? Contrôlez les espaces naturels sensibles.

Le certificat d’urbanisme, gratuit et valable 18 mois, vous donnera toutes ces informations. Le coût de la tranquillité est de 0 €, avec un délai d’obtention de 1 mois.

Peut-on contourner le droit de préemption ?

Non. Toute manœuvre est sanctionnée. Par exemple, déclarer un prix supérieur est une mauvaise idée, car l’administration vérifiera. C’est le cas de ceux qui seraient tentés de dissimuler une partie du prix via la vente de meubles, car une requalification automatique sera opérée si l’écart est disproportionné.

Prenons un exemple concret : vous vendez votre appartement 1,2 million d’euros à un acheteur, mais pour dissuader la mairie de préempter (elle devrait payer le prix affiché), vous déclarez officiellement 1,5 million dans la DIA. En parallèle, vous organisez avec l’acheteur un « dessous de table » inversé : il ne paiera réellement que 1,2 million.

Cette manœuvre classique a toutes les chances d’échouer, car l’administration peut exiger vos relevés bancaires, faire expertiser le mobilier et découvrira la fraude. Les conséquences ? La mairie préemptera au prix total réel (1,2 million), la vente peut être annulée, vous écoperez d’une amende, voire de poursuites pénales pour faux et usage de faux.

Les seules options légales : soit attendre patiemment la « purge » du droit de préemption (le délai de 2 mois sans que la collectivité se manifeste), soit contacter la mairie en amont pour savoir si elle a des projets sur votre secteur et éventuellement négocier directement avec elle.

Quel impact sur les délais de vente ?

Le droit de préemption rallonge mécaniquement les délais. Comptez 2 mois incompressibles entre la signature du compromis et la purge du droit. Si préemption avec désaccord sur le prix, ajoutez 6 à 12 mois de procédure judiciaire. Pour l’immobilier de prestige parisien où les acquéreurs étrangers sont nombreux, ces délais peuvent faire échouer des ventes.

Astuce de professionnel : intégrez une clause suspensive de non-préemption dans le compromis. Si la commune préempte, vendeur et acquéreur sont libérés sans pénalité. Prévoyez aussi un délai de réitération suffisant dans l’acte de vente immobilier : minimum 3 mois après le compromis pour intégrer sereinement la purge du droit.

Le droit de préemption dans l’immobilier de luxe : quels risques ?

Les biens de prestige attirent particulièrement l’attention des collectivités. Un hôtel particulier peut devenir un musée, un grand appartement être transformé en logements sociaux. À Paris, la mairie préempte régulièrement dans les beaux quartiers pour maintenir la mixité sociale.

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